Rencontre FNAC et premier article
Publié le 11 Avril 2016
Ce n'est pas le moment de céder à la paresse... Je laisse s'accumuler les premières news depuis samedi... et je ne sais plus pas où commencer... Allez, pour ce soir, ça sera les gros morceaux... Et vous aurez les 3 premières chroniques demain... Est-ce la maturité qui me gagne en ne cherchant plus à être le premier à partager la dernière actu? On verra ça dans les jours qui viennent.
1) L'ACTU DU JOUR
Jean-Louis sera à la FNAC Montparnasse à PARIS. Vendredi 22 avril 2016 à 18h.
Comme il le dit dans Magic, "si Morituri ne fait pas l'affaire, je risque de tomber dans une grande frustration. Le deal, c'est de durer en donnant de la matière. Mais sans feedback... Je ne suis pas un surhomme non plus". Il faut donc se résoudre au service before-vente.
http://www.fnac.com/Paris-Montparnasse/Jean-Louis-Murat/cp30214/w-4?SpaceID=45
2) C'est chez SLATE qu'on a découvert sur internet le premier article de fond (samedi)... assez conforme à ce qui est écrit du côté de MAGIC! Ceux qui veulent garder un peu de mystère sur l'album avant de l'écouter ne doivent pas le lire, ceux qui l'ont écouté découvriront le sens ou une clef de beaucoup de chansons... L'article revient sur la genèse de l'album, en revenant sur l'année 2015.
Je constate que le lien de SLATE associe MORITURI et attentats: http://www.slate.fr/story/115917/murat-morituri-attentats .
Le titre est presque plus sobre: "Avé Murat, ceux qui ont vu mourir 2015 te saluent".
Merci de lire tout ça sur slate.fr
Reproduction ci-dessous:
Du 7 janvier au 13 novembre, le chanteur revisite la façon dont l'année écoulée a pesé sur l'enregistrement de son «Morituri». Entretien.
Non, Jean-Louis Murat n’a pas écrit sur le 13 novembre 2015. Pourtant, la chanson «Interroge la jument», qui parle d'un massacre en terrasse, est née bien avant les attentats de Paris. Non, Jean-Louis Murat ne lit pas non plus l’avenir dans une boule de cristal. Pas de prescience, mais une conscience aigüe de l’actualité et de l’histoire.
Après avoir chanté l’an dernier sa région dans Babel, le chanteur français a, pour la première fois, voulu raconter l’année en cours. Le disque s’appelle Morituri, ce mot latin signifiant «ceux qui vont mourir». Tout au long de l’année, Murat a pris des notes, écouté la radio, lu la presse et mis l’actualité en résonance avec l’Histoire qu’il chérit. A l’inverse des chanteurs centrés sur leur nombril ou de ceux «engagés», il a trouvé une voie médiane et s'est mis «hors-jeu».
Ses textes, ultra-référencés, sont à la fois instinctifs et travaillés. Il faut une écoute attentive pour en capturer les nuances. Mais comme dans toute poésie, chacun peut aussi y trouver ce qu’il y cherche. Jean-Louis Murat nous donne quelques clefs sur son année 2015, en refusant tout propos «politique» et toute idéologie («Cette manie française», tacle-t-il). Morituri a voulu jouer sur la sensation et les impressions qu’ont pu nous laisser cette drôle d’année. Attention, ça colle.
janvier 2015 Le choc et le déni
«Quand j’ai compris ce qui se passait, j’ai commencé à prendre des notes, presque heure par heure pour bien me souvenir de tout ça. J’ai reçu des premiers coups de fils me disant qu’il se passait quelque chose de grave à Charlie et ma première réaction a été de me dire "Je m’en fiche, je ne veux pas savoir." C’est étrange, non? Comme si j’avais tiré un trait sur ce que représentait Charlie depuis longtemps. La mort de la policière, le supermarché casher m’ont fait prendre conscience de la dangerosité de tout ça.
La manifestation a été un autre moment fort. D’emblée je me suis mis toute ma famille (et ma belle-famille) à dos. Je leur ai dit "Je ne veux pas faire le défilé Jean Moulin". J’étais bien conscient que ça ne changerait rien du tout, étant donné ce qu’est la mentalité française.»
février 2015-avril 2015 La prise de conscience
«Je suis reparti en tournée et c’est là que j’ai compris que ça avait touché les gens en profondeur. Le sujet revenait tout le temps dans les discussions que je pouvais avoir avec le public à la fin des concerts… Je me suis rendu compte à la fois de l’effet sentimental de cet attentat et en même temps, j’étais sûr que ça ne déboucherait sur aucune question sérieuse. La loi sur le renseignement est la tentative du gouvernement de montrer qu’il peut apporter une réponse et dans le même temps, on sait que le suivi des frères Kouachi a été désastreux. On est tellement dans l’émotion… Depuis le temps que je fais ce métier, je sais bien que manier de l’émotion, c’est comme manier de la nitroglycérine.»
avril 2015 La crise des réfugiés fait rage:
La crise des réfugiés agite l'Europe. Murat en tire «French Lynx», le premier extrait de Morituri:
«Tu rumines au sextant / Tu te crois indigène / Mais tout est éboulis»
mai 2015 L'acceptation
«Je finis ma tournée et je me rends compte que nous sommes en train de vivre une année exceptionnelle. Babel était un double album et j’y faisais un peu le chanteur AOC car j’y chantais l’Auvergne et un canton. Je détermine le concept du prochain album: témoigner de l’année 2015 et entrer en studio pour enregistrer les nouvelles chansons une semaine après le dernier concert de la tournée.»
Murat est obsédé par l’Histoire et la littérature: «Chez Flaubert, tu ne sens pas le poids de l’histoire. Dans son œuvre, il ne parle pas de Sedan, par exemple. Chez Proust, on ne parle quasiment jamais de 14-18, à part pour évoquer un pilote allemand qui passe au-dessus de la tête. J’ai voulu prendre le contre-pied de ça et évoquer cette année.»
Et comme l’atteste le très gracieux «Frankie», Jean-Louis Murat offre aussi une belle déclaration d’amour à la France. «Que n’aurais-je pas fait pour Frankie , c’est que n’aurais-je pas fait pour le pays qui m’a fait, pour la langue française… Etant un pur produit de la langue française, qu’est-ce que je ferai pas pour protéger ma langue?»
été 2015 L'écriture
«C’est là que j’ai écrit tout l’album. J’ai voulu témoigner de l’ambiance du pays. C’est là que j’ai écrit "Interroge la jument" et son passage sur les terrasses:
"Sur la terrasse, sous les cimes, à l’heure où le festin se termine. Sur la terrasse, sous les cimes, Satan est heureux, il a régalé ses convives..."
"Sur la terrasse, sous les cimes, où tout bien pesé on t’assassine. Sur la terrasse, sous les cimes, n’y-a-t-il plus de ciel pour y foudroyer ces novices"
J’ai voulu saisir l’ambiance de l’année. Le titre provisoire était 2015… Je vois ces traversées de violences, ce sont comme des visions mais c’est tout sauf de la prescience. C’est vraiment ce qu’il y a dans l’air du temps.»
Septembre 2015 Finalisation des titres et de la pochette
«J’ai fini toutes les chansons et je sais que mon album va s’appeler Morituri. La pochette est faite également. C’est une photo de moi, mourant, entouré de fleurs. Je repars en tournée pour encore quelques dates.
Je n’ai RIEN changé à part la pochette, évidemment.»
Octobre 2015 vacances romaines
Au départ, avant les attentats de novembre, Morituri faisait référence à Vercingétorix et Jules César. Pendant les vacances de la Toussaint, Murat est parti en vacances à Rome visiter et s’imprégner des lieux supposés de torture du Gaulois, pour voir où Vercingétorix était passé et pour comprendre comment une culture dominante pouvait traiter les dominés.
Le chanteur, dont l’une des obsessions est d’être «un harki de la culture américaine», se demande ce que signifie être un être un chanteur français sous influence américaine. Ce thème traverse également l’album.
Novembre 2015 l'enregistrement
«Le 13 novembre, je suis en concert à Guéret.
Le 14, je veux annuler mon concert mais on me fait comprendre qu’il faut que je joue, que l’on n'annule pas un concert comme ça, que ça coûte de l’argent, etc., donc je chante encore une ou deux fois alors que je n’en ai aucune envie…
Les gens attendaient que je dise quelque chose mais je n’ai rien dit. Je n’aime pas les réactions épidermiques.
Trois jours après Saint-Denis, je rentre en studio à Paris, au studio Davout. Aucun de mes musiciens n’est parisien et tous veulent annuler en pensant que ça ne va pas le faire.
J’avais ces textes qui voulaient témoigner de l’ambiance générale mais on ne les avait jamais répétés sur scène. Les évènements éclairaient mes chansons sous un jour totalement nouveau. Je découvre en fait ce que j’avais écrit.
C’est l’ingénieur du son qui me fait remarquer le texte sur les terrasses… Je n’ai toujours pas bien compris comment ces mots sont arrivés là dès septembre. Mais c’est la responsabilité de l’artiste de sentir ce qu’il y a dans son époque… Je ne sais pas pourquoi j’ai vu les choses comme ça… Que Satan allait ouvrir une nouvelle usine… c’était dans l’air. Je ne peux pas en dire plus car je ne veux pas avoir la connerie de donner des explications à ce qui a été fait de manière purement instinctive.
Quand on suit l’actualité, tu vois que ça ne s’arrête jamais et que ce genre d’attentat, c’est partout, tout le temps. Et quand tu écris des textes aussi ouverts que les miens, on peut avoir de nombreuses explications.»
mars 2016 le cafard
« Ce qui s’est passé me file le cafard. Cela fait quinze ans que quand je descends à Paris, je vais dans un hôtel qui donne sur la rue Nicolas-Appert et sur l’impasse qui sert de dégagement au Bataclan. Cette année, je ne veux pas y aller. C’est vraiment bête… J’en veux presque à la capitale de ce pays où il a pu se passer des trucs comme ça… C’est une sensation diffuse. C’est ce que je raconte un peu dans la chanson "Le Cafard":
"J’ai eu le cafard / C’est quoi le cafard / Difficile à dire
C’est comme un buvard / Qui te boit la joie / Te prépare au pire
C’est un animal / Qui fait un carnage / Chez les colibris"
Je finis l’album sur cette sensation un peu confuse, même pour moi, de tous ces jeunes gens qui, en 1940, partent sur l’île de Sein pour se barrer. Ou pour se mettre à distance… Je tenais beaucoup à finir le disque là-dessus.»
Auteur:
Eric Nahon (Journaliste culture / musique pour slate.fr Directeur adjoint de l'Institut Pratique du Journalisme de Paris-Dauphine à @IPJDauphine)
PS: Gaël Rakotondrabe, le talentueux pianiste de Morituri, vient de perdre son papa. Sincères condoléances à lui, et à ses proches.