3e chanson de la chronique que Murat nous fait du mouvement des gilets jaunes, toujours avec des sons de manifestation en fond sonore. La mélodie est plutôt réussie cette semaine, même si elle est plutôt tenue, et petite particularité: Murat a glissé un calembour, il n'est pas coutumier du fait.
La maman a son fils gilet jaune... Elle n'y croit pas trop : "ça ne va changer l'air de la chanson"... Il lui répond : "c'est toi qui m'a fait".
[A noter bien sûr cette faute d'orthographe qui s'affiche... mais geule est correcte en ancien français! EDIT: Une nouvelle version corrigée a été mise en ligne lundi 1/04]
1) Merci à l'auteur qui me signale son article... On l'avait déjà croisé : il a déjà interviewé Jean-Louis... et plusieurs fois, mais on ne dévoilera pas son identité!
Allez, on prend ses valises, et on se fait une petite virée dans le Sancy, à la recherche de Jean-Louis... On l'a tous fait.... ou presque... Joe Stratocaster signe un bel article aux multiples évocations muratiennes de son petit périple.
"Je vais vous parler de mon périple. De mon Odyssée, de ma quête. Ulysse perdu dans l’au-delà. Comme je ne suis pas un ricain exilé dans l’hexagone, j’ai mon Mississippi à moi : la Dordogne. Et comme il me fallait fuir, retrouver mes racines, caresser les vaches, boire un canon, évacuer la migraine d’une ville intoxiquée par ses problèmes, j’ai finalement décidé d’y partir pour retrouver Jean-Louis.
Depuis quelques années je rêvais d’aller perdre mes pieds dans les monts d’Auvergne. Vers un pays que je ne connais pas, un îlot sauvage évoqué, chanté, magnifié par la grâce d’un chanteur connu de moi et de quelques autres. Des milliers, des millions ? Un vague souvenir chez les uns, un monolithe de la chanson qui inspire le respect et l’admiration chez les autres. Artiste en global. Peintre, artisan, écrivain, poète, chanteur de l’ombre en plein cagnard.
Un nom de prince de l’empire, un pseudo évocateur de batailles. C’était presque perdu d’avance. Ça m’excitait. Pour compagnon de ma retraite : j’avais mon chien à la place du mort. Mon GPS foireux dans la bérézina des cartes. J’étais à coté de la plaque. Direction la Bourboule. Ca monte pas mal, on récupère de l’oxygène. Pas de quoi fouetter un chat ou remplir les 4000 signes nécessaires pour chier un article laudatif.
Premier arrêt en plein centre de la cible. Une bière en terrasse non propice à la confidence malgré l’affiche qui déclame « Pas de Giscard mais du Ricard ».
Je déambule en funambule de ma passion du Christ. Je trouve une gargote à touriste en février. Ce n’est pas la période des vacances à la ferme, c’est celle du ski, la lourdeur de la foule m’empêche de prendre du plaisir. Les gens sont mal habillés avec des vestes couleurs chaude. Société du divertissement quand tu nous tiens. Remises en bas des pistes crache la sono municipal. Je m’attendais à Fort Alamo mais là… je suis servi. Les sportifs du dimanche sont riches, beaux, grands et médiocre. Moi, je vis dans la crasse, je suis dégueulasse et je m’en fous.
« Ca aurait été Christophe Maé, j’aurais pu vous aider »
J’avise une gougnafière pour lui demander par où je dois aller afin de (re)trouver le barde du coin. J’ai bien envie de lui demander où va la neige quand elle fond mais je me contente de lui acheter un saucisson en attendant qu’elle me localise le moujik. Malheureusement il n’est pas connu à cette adresse, elle ne connait même pas son nom. « Ca aurait été Christophe Maé j’aurais pu vous aider ». Manque de bol pour moi le mien, de chanteur, est plus complexe qu’une rime pauvre.
Comme il glisse quelques indices dans à ses chansons sur son habitat naturel, je lui demande où se trouve le « Rocher de l’Aigle ». Elle connait. J’y grimpe. C’est beau mais, crotte de bique mis à part, pas de folk-singer dans les parages. Alors accueille moi, paysage. Un disque tous les ans, comme un pommier pond ses fruits et l’autochtone le confond avec un clown. Je comprends mieux qu’il soit, un peu, beaucoup, passionnément, désabusé.Je fais pisser le chien en haut des volcans, j’organise une balade au lac Chambon, je zigue-zague sur les monts d’Auvergne-sans-Soucy, c’est massif. Je bouffe comme un homme, c’est le court ordinaire des choses qui me rebooste la couenne. En repartant en ville pour me faire un ciné-vox, je m’interroge sur le fait de savoir si localiser Tino Rossi en Corse est aussi casse-bonbon.
« Vous tournez à gauche en sortant du virage en S, vous prenez à droite à l’embranchement en Y et vous arriverez dans un lieu-dit : c’est là »Il y a des travaux sur la N89. Je me gare en face du casino de la Bourboule, j’évite le parc surpeuplé. J’achète des clopes. Comportement anti-social. La buraliste est charmante, Lilith de mon coeur, je veux lui pincer les fesses mais elle rechigne à me tendre le cul, hold-up cow-boy et macadam. En pacte de non-agression, je pose pour la vingtième fois la même question. Et elle, Dolorès, elle sait. Je me doutais qu’une carrosserie pareil devait avoir autre chose que Marc Lavoine comme modèle. « Vous tournez à gauche en sortant du virage en S, vous prenez à droite à l’embranchement en Y et vous arriverez dans un lieu-dit : c’est là ». Là ou il crèche le petit Jésus.Mon chien me guide en aveugle. Tout est plutôt calme et joli. Loin de tout. Parfait pour composer, rêver, prendre et donner. J’avise le nom du bled sur une pancarte en bois. Pas d’affiches 4×3 pour se féliciter en mode. « C’est ici ». Je prend un café au bistrot.« – Vous connaissez Jean-Louis ?
– Oui mais il vit en ours, faut pas le faire chier. On le voit jamais. Il est dans sa ferme. Des fois on le voit traverser la place à toute vitesse… ».C’est le dahu ce mec. Une semaine de pâturage, sept jours de traque et je touche au but. Sur le fronton de l’Eglise il y a des instruments de tortures datant du moyen-âge. Je me demande s’il n’y aurait pas fait sécher Alain Voulzy ou Laurent Souchon pour se distraire.
2) Baptiste VIGNOL s'est bien-sûr fendu d'un billet sur son blog pour fêter "CHEYENNE AUTUMN". Il feint peut-être et toujours d'être choqué par l'absence d'honneurs faits à nos grands talents (notamment lors des victoires de la Musique), mais c'est tout à son honneur.
Le 27 mars 1989, Jean-Louis Murat, photographié par Jean-Loup Sieff, débarquait avec CHEYENNE AUTUMN, l’un des quatre ou cinq immenses disques de la décennie. Douze chansons idéales. Pour un univers parfaitement neuf. Qui ouvrait une fenêtre alléchante sur les années 90, annonçant en quelque sorte Dominique A, Autour de Lucie, Katerine, Holden ou Miossec... Alors, peut-on s’étonner qu’aucun hommage n’ait eu lieu pour honorer cet album fondateur? Non. Car le risque était grand que Jean-Louis Murat, toujours actif sur des landes à débroussailler, s’en moquât goulument, n’y trouvant aucune matière à se réjouir de quoi que ce fût. Ne chantait-il pas dans Paradis perdus : « Vois, ma quête est frénétique / J'ai le sommeil gorgé d’eau / Je rêve d'une musique / Pour tous les animaux… »? Un orpailleur. Un vrai. Sinon, LE MANTEAU DE PLUIE, deuxième château fort de sa discographie, serait dévoilé le 30 septembre 1991. Nostalghia.
[C'est vrai qu'on peut regretter que la réédition n'est pas coïncidée avec l'anniversaire, avec un plan promo adapté, ce qui aurait pu susciter un peu d'intérêt médiatique... mais le fait est l'actu muratienne ne s'arrête pas... Il faut se concentrer sur la sortie du prochain disque... Le live.. Quant à une émission télé de prestige, on l'attend toujours. Je me rappelle avoir lancé une pétition au moment des 30 ans de carrière, en 2001... Mme B. l'avait signée... ]
Des choses remises à plus tard, pour l'occasion, pour la période de désert, pour quand j'aurai un peu d'énergie, j'en ai un certain nombre... mais telle Médor et ses os, je les oublie pour la plupart. C'est ballot, ronger, c'est quand même un de mes plaisirs.
Enfin, bon, là, je me suis rappelé d'un truc... (et j'en profite pour rajouter quelques éléments)
1) Voici donc une petite chronique de Didier Varrod sur Cheyenne Automne:
C'est issu de :
Edition du Rocher/régie productions, 1992 (un des nombreux cadeaux que m'a faits Matthieu !)
Les chroniques sont datées (dans le sens premier du terme), la plupart des portraits aussi, mais pas les pages de Murat. Le portrait date de l'émission POLLEN du 18 mai 1989. Matthieu qui l'a écouté me parlait d'une belle intervention de Didier Varrod, "qui ne laisse pas Murat insensible". Les deux chansons qu'il y avait chantées:
Le jeune secrétaire générale de Fréquence Gay en 1982 (passage télé lors de la dépénalisation de l'homosexualité, en 1982): Matthieu avait trouvé l'archive (depuis, l'INA a diffusé l'interview -en juillet 2018-, elle est donc disponible sur le net). [Retrouvez quelques propos de Matthieu en fin d'article]
Encore quelques mots sur "Cheyenne Autumn":
- Anne-Marie Paquotte : "Il a publié le meilleur album chanson de l’année … l’écriture fine, la musique mesurée, l’ellipse maîtrisée, l’image lumineuse de paysages entrevus en rêve, par lui parcourus "
- En 1996, Les inrocks pour leur 10 ans l'ont classé 25e dans leur classement des disques essentiels de la décennie (au milieu des anglo-saxons!)
Mais Cheyenne Autumn, c'est Dominique A qui en a peut-être le plus parlé... Celui qui est devenu la référence pour tant de chanteurs a eu comme référence, comme "déclencheur", ce disque:
Je devais d'avoir trouvé ma voie, et ma voix, à Cheyenne Autumn; cet album m'avait parlé comme peu d'autres en français auparavant, et il m'avait glissé :" arrête de hurler"
"Vers la fin des années 80, les alternos tiraient tout vers le bas. Je me suis construit contre cet esprit simili-populo, cette foire du slip démago, sans propos musical. Du coup, CHEYENNE AUTUMN, de Murat a été capital. Il ramenait vers une certaine poésie, des arrangements désuets... JE me suis lancé et d'autres sont apparus en même temps, Katerine, Miossec, Vanot, Boogaerts.... Godard a dit : "je ne peux pas faire de bons films si d'autres n'en font pas." Moi, c'est pareil avec les disques...
PS: Murat disait que ce n'était pas tout-à-fait conscient d'avoir repris le titre d'un film de John Ford, même si il l'aime et qu'il a utilisé des images (clip ci dessous).
Sur Arte, on peut encore regarder un documentaire sur "L'Amérique de John Ford", Intéressant.
22/04/89 chez Ardisson (playback) et en live en 1994:
2) Michel Legrand
Bon, je n'avais pas encore rendu mon petit hommage, moi qui aime tant les Demoiselles. Pas de propos de Murat à son sujet, mais comme souvent, je suis allé voir dans le livre de Dejacques (mon article sur lui) ce qu'il pouvait nous en dire... Claude Dejacques qui a signé Murat chez Pathé a travaillé avec le duo Nougaro/Legrand, puis sur des projets avec le maestro... souvent au studio DAVOUT... où Murat a enregistré bien-sûr également.
COrine Marchand
QUELQUES MOTS EN PLUS DE MATTHIEU
Voici les mots de Matthieu puisque ça me plait de le citer:
"Il intervenait sur le plateau du journal de la nuit, en tant que Directeur des programmes (je crois) de Fréquence gaie, le soir où l'article faisant de l'homosexualité un délit fut aboli. Mais je t'ai envoyé l'image pour tes archives personnelles. Manifestement, dans les bios qui circulent sur lui, il n'évoque pas ce passé militant. C'est assez étrange, car il ne se cache pas d'être homo, il y fait souvent allusion, mais jamais rien sur ces années où il était plus engagé. Après, il peut y avoir plein de raisons personnelles que je ne connais pas. Bref, tu gardes la photo pour toi. On pourra s'en servir si un jour on lui consacre un portrait complet, mais a priori, on ne l'a pas prévu..."
De toute façon, un jour ou l'autre, toutes les archives audiovisuelles seront en ligne pour tout le monde, alors... Ce sont les enfants de tes enfants et ceux de tes bâtards (conçus avec les jeunes femmes que tu es censé conseiller) qui profiteront de tout ça... en supposant que la muratophilie soit héréditaire (et qu'ils ne soient pas devenus sourds à force d'écouter ACDC à fond à l'école) !
- Quant à Varrod et son rapport à la chanson dans ce qu'elle a de commercial, c'est encore un autre sujet, relativement vaste. Il a signé les biographies de Goldman, de Balavoine, pas celle de Benin ou Leprest, on ne peut pas dire qu'il se cache. Et Serge n'avait certes rien à voir avec Chorus. Mais Chorus, à la fin, consacrait ses "une" à Goldman et Cabrel. Alors... Les guerres fratricides à l'intérieur du monde des amateurs de chanson sont anciennes, je l'ai bien vérifié en me plongeant dans la revue de Lucien Nicolas. Kemper a raison sur un point au moins : à Radio France, Meyer (Inter) et Azera (Culture) sont les derniers à défendre une certaine forme de chanson qui ne passe presque plus sur les radios commerciales.
Le caractère de Varrod, ce serait encore un autre sujet. Est-il un pur opportuniste ? Je n'étais pas favorable à sa nomination comme directeur de la musique, je l'avais dit à Alexandre à l'époque. Subit-il des pressions ? Souvenons-nous des propos de Laurence Bloch dans Le Monde l'an dernier. Mais aussi du fait qu'il y a eu sur Inter une disparition progressive des spécialistes qui a commencé avant Varrod (Foulquier/Dhordain pour la chanson, Lenoir pour le rock, Delli-Fiori pour le jazz, Lodeon pour le classique, Pierre pour l'électro). Sans oublier Lavige et Le Vaillant, plus généralistes. Par ailleurs, cela fait belle lurette que la chanson qu'aime Ton Pire Ennemi n'a plus tellement droit de cité sur les grandes ondes. Une hypothèse serait que Varrod poussait au maximum sa curiosité lorsqu'il bossait avec Foulquier, précisément parce que le vieux était là. Et qu'une fois seul, il n'a plus été capable de résister aux pressions et aux tentations diverses. Même quand il faisait Électron Libre, il était sur un créneau pointu, mais je ne suis pas sûr qu'il ait été particulièrement pointu à l'intérieur de ce créneau pointu (contrairement à Laurence Pierre qui défrichait vraiment le genre).
Tout cela me rend bien triste, mais ce n'est pas nouveau.Je t'envoie un apéritif léger et sucré, tu me réponds par un digestif amer. Salaud, va ! [au moment de l'arrêt de Dordhain)
Et oui, le 27 mars 1989, sortait ce qui pouvait passer à l'époque pour le premier album de Jean-Louis Murat, "Cheyenne Autumn". Je n'ai pas le "bon de sortie", mais la date m'a été donnée par la maison mère. Un article m'indique que le 45 T "l'ange déchu" sortait simultanément. Quelques mois plus tard, le disque d'or était certifié.
Allez, tous ensemble: "Joyeux anniversaire, Joy-eux anni-ver-saire, joyeux anniversaire, Cheyenn-au-tumn, joyeux anniversaire!".... Merci pour lui.
Allez, pour l'occasion, une archive inédite!
L'autre jour est tombé sur le minitel, enfin le telex, une interview de Christophe CONTE dans GONZAÏ, une interview fleuve dont 99,9% des gens se foutent royalement sans doute, mais qu'avalera avec avidité les 0.1% restant, je veux parler des amateurs de presse musicale... et il y en a encore quelques uns (mais il ne faut pas que je me fie à mon petit monde facebookien). Avec avidité, que dis-je, sado-masochisme peut-être, du fait de la fascination/détestation exercées par les Inrocks, que Conte a incarnée, notamment en se mettant en première ligne avec les billets durs (il prit d'ailleurs un tacle sévère de Gonzaï) et en ne se réservant pas les meilleurs morceaux de la critique (c'est-à-dire des anglo-saxons).
C'est toujours assez coquasse de constater comme l'amour de la musique peut aussi passer par le papier, où se figent les passions et les modes, pour une activité qui s'en passe souvent (de papier à musique). Christophe Conte le dit lui-même: " Rapidement, je m’intéresse presque plus à la presse musicale qu’à la musique. De façon obsessionnelle, parce que je trouvais ça intéressant en soi. Je n’ai pas forcément besoin d’écouter les disques*, en entendre parler me suffit, et c’est également par la presse que j’ai appris une forme de littérature, car je ne lisais pas ou peu de livres à l’époque". Ceux qui conservent des kilos et des kilos de papiers dans le cagibi le comprendront. (*aaah: ceci explique donc certains cela).
Tout ceci nous vaut le succès (ou l'édition du moins) de nombreux livres de "rock critiques": Manoeuvre récemment, et on a parlé ici avec P. Barbot du sien, de Bigot... même si, en matière romanesque, on est loin d'atteindre Pacadis.
Christophe Conte n'y va pas de sa bio pour l'instant, et on l'en remercie. Chaudement. Pour l'heure, une interview longue convient tout-à-fait... et si je vous en cause, of course, c'est que ça évoque Murat.
Précisons qu'on ne peut pas ranger Conte dans les muratiens fervents, façon Bayon, Nuc et quelques autres. Il n'a ainsi pas signé une seule chronique d'un disque de Murat dans les Inrocks. M. dans son "10 bonnes raisons de détester Jean-Louis Murat" citait cette phrase : "Ce que Murat raconte, c'est vraiment pour moi devenu un vrai mystère […] J'ai l'impression d’entendre Frédéric Nihous qui a avalé de travers Les Nourritures terrestres" ("la dispute" sur France Culture, 2011 pour le grand Lièvre- on verra que son style n'a guère changé en 20 ans). Un rien bloqué sur cet aspect naturaliste, à l'époque de Morituri, il twittait " "Sur le nouvel album de Jean-Louis Murat, il y a une chanson intitulée Interroge la jument. J'en parlerai à mon cheval"... Il s'inquiétait même déjà de l'avis de Murat sur "Chasse-pêche, Nature et tradition" en août 99 (sa seule interview avec lui).
Toi qui as usé beaucoup d'énergie pour donner aux citadins une image assez flatteuse de la ruralité, tu dois être miné par Chasse, Pèche, Nature & Tradition?
J'ai surtout fait les louanges de la paysannerie de légende, en hommage à mes grands-parents. C'est ça que j'aime et que je ne trouve plus que chez les personnes de plus de 70 ans. La nouvelle paysannerie, j'en ai rien à foutre. Les jeunes paysans sont pires que les pires industriels pollueurs. J'habite à la campagne et ce sont mes pires ennemis. Je n'ai d'échanges qu'avec les vieux, qui eux aussi trouvent que les moins de 50 ans sont des craignos. Les lobbies du genre CPNT, c'est ni plus ni moins que de la contre-culture d'extrême droite. En même temps, même si j'ai toujours été contre la chasse, je comprends que des mecs qui n'ont pour seule distraction que le club de chasse n'aient pas envie qu'on les en prive. Ils placent ça sur le même plan que si on s'en prenait au club de lanceurs de fléchettes. La chasse, c'est souvent le seul moyen qu'ils ont trouvé pour ne pas se faire chier. Les citadins trouvent que c'est dégueulasse de tirer en pleine tête de la petite biche si gentille, mais eux ne le voient pas comme ça. C'est autour de ça que s'organise toute la vie sociale de leur petit pays et si tu leur ôtes ça, il n'y a plus de vie sociale.
Cette interview reproduite dans son livre cosigné avec Berbérian "la Française Pop" est issue du supplément spécial des inrocks "Murat en Amérique" (avec les photos de F. Courtès (inter-ViOUS ET Murat à relire), et les signatures de Beauvallet, Vivian, R. Robert, S.Deschamps...), dont il était le "responsable". Dans l'introduction du livre, il indique : "J'ai aussi beaucoup écouté Murat quand j'ai écouté cette chanson [Le garçon qui maudit les filles]". Et de raconter qu'il a fait appel à Murat pour le Village vert dont il était le cofondateur pour le disque d'hommage à Dassin... Il raconte aussi cet épisode dans Gonzaï.
J’avais cette idée à la con de faire une compile de reprises de Joe Dassin. J’avais vu une émission sur lui sur TF1, et je trouvais qu’il y avait chez lui des vraies chansons pop, pas uniquement de la grosse variété gluante. Je connaissais un peu Les Objets, Bill Pritchard, Jérôme Soligny, Philippe Katerine, Dominique Dalcan, Jean-Louis Murat, etc. On leur a soumis l’idée de reprendre Joe Dassin. Tous étaient hyper enthousiastes. La première référence du label, c’était ce tribute un peu cocasse, chez Columbia. Bertrand Burgalat avait entendu parler de ce projet de compile, il est venu me proposer de faire quelque chose dessus. Ce qu’on a évidemment accepté. Ce truc a mal vieilli mais dessus, t’avais vraiment un catalogue de gens importants à ce moment-là. Ca a donné de la crédibilité à la démarche artistique du label, à savoir proposer un truc pop en France. A l’époque, en France, personne n’en avait rien à foutre de la pop.
Hélas, pour lui, il raconte qu'il a revendu ses parts juste avant la signature de Luke... et sa "sentinelle" à succès... Unlucky (je vous évite du coup un jeux de mots avec "compte" pourtant j'en avais trouvé un correct, ne cédons pas à la facilité).
L'autre mention de Murat dans l'interview remonte à ses débuts de chroniqueur:
Christophe Conte : Au lycée j’avais créé un fanzine, Seppuku, toujours mon obsession Taxi Girl. Lorsque je débarque à Paris, je décide de continuer en me disant que ça peut servir de carte de visite, car c’est vraiment le métier que je veux faire. Je n’ai aucun plan B. Je vends mon fanzine à la cafétéria de ma fac. Je le fourgue aussi chez New Rose. Je fais un seul numéro par ce que je suis tout seul et que ça m’ennuie. Niveau études, je suis en arts plastiques, à Saint Charles. Pour la culture générale parce que j’ai aucun talent de plasticien. Je n’ai aucune idée sur la façon de devenir journaliste mais, pour ce que je veux faire, je sais que ça ne passe pas par les écoles traditionnelles. Je démarche des fanzines, mais c’est long. Je parviens quand même à en faire un ou deux avec des gens, mais sans affinités. Et puis, vers la fin des années 80, j’ai vu une opportunité dans Rockland, un nouveau magazine qui se montait. Le rédacteur en chef était Gilles Renault, qui plus tard sera aux Inrocks et à Libé. Je vais voir les mecs de Rockland, et ils me filent deux trucs à chroniquer : Jean-Louis Murat et XTC. Gilles me dit alors « Tes chroniques sont bien mais faut rajouter des vannes ». Faut dire que Rockland, c’était ça. Je me souviens d’un mec qui faisait une chronique de Simply Red, un groupe en déclin, et qui terminait par « Ils ne sont pas encore grillés mais simplement rouges ». Après deux ou trois numéros, le magazine se casse la gueule. Je me retrouve dans Backstage, un canard monté par des dissidents de Best et Rock & Folk. Notamment Philippe Blanchet, à qui je dois beaucoup. Un jour, je force la porte de son bureau. Il était là, avec sa tête de Gotlieb, hyper sympa. J’étais venu avec des disques que je venais d’acheter à la Fnac. Il me sort : « allez-y, chroniquez-les et on verra ce que ça donne ». Il m’a donné ma chance alors qu’il y avait dans Backstage des gars comme Philippe Barbot, Hugo Cassavetti, etc. Des mecs plus âgés. Blanchet m’avait à la bonne, il me confiait de plus en plus de choses. Même faire des papiers ou des interviews, ce que je n’avais plus fait depuis le fiasco Taxi Girl. Puis le journal s’est cassé la gueule. Il appartenait à un escroc qui avait foutu le feu aux locaux en faisant croire que c’était accidentel pour toucher la prime d’assurance.
J'ai apprécié l'anecdote comme je les aime du patron indélicat en fin de paragraphe mais me suis précipité dans mes archives... Pas de Rockland! Christophe, toujours prêt à te répondre sur les réseaux.... n'étaient plus certain du numéro... J'ai donc mené une petite enquête sur les sites marchands et trouvé une partie de la collection. Vu les prix, je me suis adressé au vendeur pour trouver le bon... et tente la négociation.... allant jusqu'à promettre une publicité gratuite sur le blog et ses 3 millions de lecteurs le siècle ("Boutique Everly24, sur RAKUTEN, votre bonheur en 24h chrono en point relais, l'essayer, c'est l'adopter, Everly 24, vos collections lui disent merci").... Bon, 18 euros dépensés plus tard... J'ai le numéro et voilà la chronique :
Rockland, mai 1989, n°10.
Gilles Renault (après être entré dans le journal grâce à Bayon) deviendra chef de service culture à Libé. Il parle de Rockland dans un article de L'orne combattante:
Le second déclic est également activé par Jean-Claude Lebon, en 1988. Ce dernier lui fait part qu’un nouveau magazine, baptisé « Rockland », recherche un journaliste pour la rubrique cinéma. Gilles Renault découvre alors tout le plaisir de l’écriture journalistique. « C’est à ce moment que j’ai réalisé que je prenais mon pied. » Il débute comme pigiste et réalise les portraits de Mylène Farmer, les Rita Mitsouko, Etienne Daho, etc. « Mais, le magazine était mauvais. Le premier numéro n’a pas marché et beaucoup de journalistes déjà établis ont quitté le navire en voyant qu’il n’y avait rien à en espérer. » Il devient alors rédacteur en chef adjoint, puis rédacteur en chef. « En réalité, je me suis retrouvé presque seul à tout faire : du standard à la rédaction et à la limite, le ménage. » Au bout d’un an, le mensuel est coulé.
Il a continué avec succès dans les vannes, Naïve obligeant même le quotidien à un droit de réponse à la suite de son titre sur Carla Bruni : "La première dame vers le bac à soldes ».
Dans ce numéro, Conte ne signe pas une critique de XTC comme il l'indique dans l'interview mais celle de "Three months, three weeks and two days" de Bill Pritchard
L'ARCHIVE EN PLUS
Il doit nous manquer des chroniques de mars/avril 89 (rien dans Rock and folk? Best?...)... mais voici celles que nous avons dès la sortie du disque:
Bon, enfin soit, tout ceci pour dire, Jean-Louis Murat a pu s'acheter un lave-vaisselle ensuite... et les murs pour le protéger.
En 1988, rue jean l'Olagne, quartier Vallières, Clermont.
LE CONTE EN PLUS
Conte, exfiltré des Inrocks, continue son bout de chemin notamment en produisant des doc... Son "Daho par Daho" a été diffusé récemment. Une longue interview sur sa carrière...
1) C'est plus court que la semaine passée... Après un son de manifestation, Jean-Louis semble exprimer cette fois le sentiment de désarroi d'un gilet jaune.
Et on remercie Jean-Louis pour ces partages! (j'oublie de le faire à chaque fois... et il ne faut pas, car sinon il va encore râler!)
PS: Dommage que les médias n'aient pas jugés utiles de relayer l'information pour l'instant... Peut-être quand la "chronique" se sera un peu étoffée...
2) Didier Varrod s'est fendu d'une chronique pour le live "inamorato" à sortir:
Une nouvelle chanson qui préfigure la sortie d’un nouvel opus, 6 mois à peine après la sortie de son dernier album studio “Il Francese”, clin d’œil à Joachim Murat, héros napolitain devenu roi de Naples. Ce nouvel album qui sortira le 19 avril s’intitule “Inamorato”.
En français, « Inamorato », cela signifie que le chanteur Jean-Louis Murat est amoureux. Loin d’éventuelles spéculations privées, cet état amoureux semble signifier que Murat court, à ne pas perdre haleine, après son saisissant dernier album studio Il Francese. Un disque de renaissance, de reconstruction, après la désintégration électronique de ses grands travaux magistraux sur la « RN 89 ».
Murat prouve une fois encore qu’il est un artiste cortexé. Parce que lorsqu’il se retrouve artistiquement en phase avec ce qu’il a de plus profond, il éprouve souvent le besoin d’exprimer sa félicité créative dans un enregistrement en public. Comme quand après l’album Babel, Murat avait retrouvé le Delano Orchestra pour figer le miracle. Ici c’est en compagnie de Frédéric Jimenezà la basse, et Stéphane Reynaudà la batterie qu’il renoue avec la mythologie du power trio. C’est "Jean Louis Murat Expérience" qui poursuit son œuvre de recommencement artistique.
Ce nouvel album live a été enregistré à Décines, près de Lyon. Enracinement provincial oblige, Murat chanteur de terroir et de territoire (bien plus que spécifiquement auvergnat) a choisi cette date de concert pour exemple. Dont acte. Nous voilà plongés dans l’idéal "muratien". L’homme, son chant et sa guitare. L’homme et ses montagnes de questions. Son chant et ses étirements sensuels. Sa guitare pilier et souffle de vie, qui l’aide à toujours trouver le sens de la hauteur : Blaise Pascal, Marvin Gaye, et Steve Cropper dans un même ensemble humain. Et c’est ainsi que ces croisements aboutis dans le destin d’un saltimbanque parfois irascible donnent souvent des chansons exemplaires.
Être parfois mal élevé avec son époque élève paradoxalement l’exigence artistique de Murat. Comme dans ce live, où soudain réapparaît une chanson issue de l’album Toboggan et où l’on réalise combien Murat chanteur est unique dans sa définition du blues français. Ce blues français c’est son bleu de travail, celui d’un orfèvre et humble ouvrier de la musique.
Lors de la promotion de son dernier album studio, Murat déclarait :
la poésie est la pratique la plus proche du mensonge. Ecrire des vers c’est apprendre à mentir. Je suis en état de défiance contre la poésie pure. J’ai flirté avec et j’ai vu que cela ne marchait pas.
Murat en version promo c’est cette humeur-là. Toujours vagabonde et changeante. Murat sur scène c’est autre chose. Une expérience chaque fois différente. C’est le tourment et le désespoir qui remplissent « Les jours du jaguar », chanson massive et abrasive qui joue la conclusion de son live. Et puis de temps à autre, Murat trouve la chanson qui renoue avec le groove, avec le petit galop irrésistible du cheval. Murat animal, sur fondation hip hop, semble nous dire que d’une tournerie rythmique on peut aussi réussir des chansons pour transistor. « Autant en faire quelque chose, plutôt que rien ». Le premier tube depuis bien longtemps pour Murat. C’est inédit et c’est réussi…
*"Gilet#1 : Chronique d’un mouvement en chansons" (ça semble indiquer qu'il y aura une suite)
Un Murat bien séculier (parlant de BFM)... mais les bourgeois n'y font pas dans leur pantalon, mais dans "leurs brailles"... On se rappelle qu'en concert, il avait eu une ou deux piques sur les gilets jaunes il me semble, mais le titre n'est pas trop dans ce registre là. Il conte le démarrage du mouvement dans le monde rurale et les réactions: "on en a vu", "il parait que", "on signale..."...
Quelqu'un comprend la phrase sur celui-ci qui prend Lucifer pour une fille, qui pensait toucher sa bille au paradis?
(bon, je ne suis pas le premier sur le coup aujourd'hui - merci Armand-... mais demain ou après-demain, petite archive inédite, je me rattrape...).
Après l'annonce il y a deux jours d'un disque live, voici un single : l'ancien inédit (il vient de perdre ce "label", ce titre honorifique cher aux muratiens), rétrogradé désormais en "outcast Il Francese", je veux parler de "Autant en faire quelque chose" que l'on a tant aimé sur la tournée (enfin moi oui).
Et surprise: cela sonne comme une version live (guitare baladeuse) mais version studio. Aurons-nous droit à un faux live? Murat nous livre-t-il en cadeau une version studio-maquette? en attendant la version live, avec la présence du public en fond? ... Et on me signale dans l'oreillette que le Pierrot, il devrait savoir lire depuis le temps qu'il écrit un blog... Car effectivement, il est annoncé (il suffit de lire oui): 8 titres live + 4 inédits... Et c'est une déception, car ça fait un disque bancale... un peu comme Mockba. Soit...
En lisant... en fait, c'est bien de lire... on apprend des choses et tout, même si ça fait à la tête.... que le live a été enregistré à Décines...
- Et on apprend que Murat va faire un peu de promo,et du live... et ça va se faire du côté d'Inter, et Murat se mêlera à Télérama... et figurera du côté du Figaro (où on l'avait un peu délaissé).
Alalala, la promo: "Décines, considéré comme l'un des meilleurs concerts de Murat depuis des années!"... J'ai relu du coup plusieurs fois pour y croire... Qui sont les éminents muratiens qui ont "considéré"? Et pourquoi ne retenir que 8 titres à ce moment-là? Bon, allez... C'était la bougonnerie du jour. En tout cas, cela fait le 2e live enregistré "chez" Victor Bosch...
Les sorties vinyles ont peu faire réagir la presse... mais voici une chronique de VENUS sur le site déjà anciens des oreilles dans Babylone... que je découvre: ils ont donc peu parlé de Murat par le passé, mais Vénus est pour eux une pépite à ranger du côté de Mustango et Dolorés.
"Il n'aime pas trop que l'on mette en avant ses talents d'auteur ; pourtant Jean-Louis Murat possède à son actif des titres comme "Amour n'est pas querelle", "A caution tous amants sont sujets" ou "Tant la vie demande à mourir", ce qui vous pose un homme.
Sa prose se prête notamment aux tournures poétiques, aux allitérations telle "La momie mentalement", étonnante chanson que l'on retrouve sur Vénus. Et Murat est devenu un peu malgré lui le mentor, le grand frère de tout un pan de la chanson française des années 90, dont les dignes représentants ont pour nom Dominique A ou Christophe Miossec.
Néanmoins et sans verser dans des audaces ni une recherche forcenée, le preux Auvergnat demeure de tous les représentants de la chanson d'ici celui dont les compositions sont à prendre au sérieux là où chez certains de ses confrères le verbe phagocyte un peu tout le reste.
Trajectoire atypique du faux-bougon, (car il ne trompe personne) musicien à l'oeuvre déjà conséquente, Murat, passé les effets de mode et les partis pris médiatiques de son début de carrière où ses ventes ont pu un instant décoller, n'est finalement pas prophète en son pays, et de manière symptomatique à la façon d'un Burgalat ou d'un Mocky dans le 7ème art sort bon an mal an des oeuvres confidentielles, tout juste relayées par les médias attentifs. Tout en continuant de drainer un public de convertis et d'adeptes qui ne se dément pas ; nombre de sites lui sont ainsi amoureusement dédiés.
En 1993 et même si son nom compte encore dans l'industrie musicale - il a atteint son apogée commerciale avec Cheyenne Autumn (1989) et Le Manteau De Pluie (1991) - et qu'il ne va pas tarder à décrocher le gros lot critique avec des albums comme Dolorès (1996) et son oeuvre potentiellement la plus aboutie qu'est Mustango (1999), les choses bougent et se corsent avec Vénus où il se montre davantage désabusé.
Il attaque bille en tête avec "Tout est dit" où débarrassé des claviers qu'il n'aime pas et qui plombaient certains de ses disques antérieurs, sa musique à visée naturaliste et amoureuse respire. "Comme au cinéma", c'est la rencontre entre Etienne Daho et les Jesus And Mary Chain.
Trois pièces de choix qui culminent à 7 minutes chacune servent de clé de voûte : il y a d'abord la chevauchée dylanesque "La fin du parcours", où Murat déjà quadragénaire fait un bilan sans concession de son existence. Puis la troublante et majestueuse "Montagne", ses nappes synthétiques, qui règle déjà des comptes avec le show business. Puis bien sûr "La momie mentalement", qui sur une mélodie espagnole est servie par un entêtant motif de clarinette basse, instrument assez peu utilisé dans la pop. Là le texte est prétexte à un travail de sonorités qui donne le vertige.
Ce qui rend Vénus touchant et donc précieux, ce sont ses imperfections, ses maladresses. La voix parfois mal assurée car encore criarde dans les aiguës, Murat se livre comme rarement dans sa carrière - Dolorès sera l'acmé qui lui succèdera ; tandis qu'avec Mustango, il atteindra en mode franc-tireur le chef d'oeuvre formel de sa discographie.
Mais cette Vénus la mal-aimée, c'était quand même le début d'un cycle organique et non des moindres du plus essentiel de nos auteurs-compositeurs contemporains.
En bref : rarement cité au profit de Dolorès et Mustango qui lui succèdent, Vénus est pourtant le premier tournant et la première vraie réussite de l'oeuvre Pantagruélique de Murat. Où pour la première fois, sa poésie pastorale se fait organique".
On en parlait en commentaires: il était annoncé du côté d'amazon un disque vinyle intitulé "innamorato"(amoureux) pour le mois d'avril.
On vient d'apprendre de quoi il s'agissait avec la mise à jour sur le site de la fnac (ça a disparu d'amazon) : il s'agit d'un live de la tournée avec 4 inédits, et ça sera disponible en cd et en vinyle (sortie le 19/04)
8 titres live extraits de la tournée « Il Francese » 2018 + 4 titres inédits (studio). « S’installe une atmosphère très lynchienne qui donne un sens plus profond à ces sonorités solides jouées pied au plancher en trio -avec notamment Fred Jimenez à la basse et Stéphane Reynaud à la batterie. Les bottes sont terreuses mais on décolle (avec un "Ciné Vox" dans l'éther et un "Gazoline" qui gagne en efficacité stonienne) en s’accrochant aux motifs qui nous rappellent quel guitariste Murat est aussi -qui, en vrai bon bluesman, lorgne vers l'âme flamenco. Et puis cette voix, veloutée, à laquelle il semble pouvoir faire ce qu’il veut. En fin de concert, l’homme se décide à aller vraiment ailleurs, reprenant a capella (et gratte frappée en pointillés) sur "Je Me Souviens", sommet du concert comme du dernier album dont les textures ont failli nous manquer. Il est fascinant de voir à quel point JL est impliqué et habité sur des territoires a priori absolument inconciliables. Que ses chansons résonnent autant avec d’aussi différents habits ne fait qu’en démontrer la grandeur."
Et vu qu'une nouvelle ne vient jamais seul: on avait oublié un peu le titre "karma girls" écrit par INDOCHINE dans un dernier album qui date déjà un peu.... Et bien, ce titre vient d'être choisi comme nouveau single!
"Le titre raconte une amitié qui dure dans le temps. On peut s’attendre à la sortie d’un clip illustrant le morceau très bientôt. Le groupe a d’ailleurs annoncé sur son compte Instagram que ce nouveau single rentrerait en radio le 13 mars à 13h !"
Bon, désolé, je ne suis pas assidu en ce moment dans cette période de désert affec.... euh... d'actualités. Pour rappel, pour ceux qui ne suivraient pas, ceux qui sont au fond près du radiateur: 1) on sait que la 3e étape de la fusée (travaux / Francese/ ?) est en cours de fabrication 2) Pour patienter, il y a des rééditions en vinyle (avec Vénus et Passions privées bientôt) 3) Murat est programmé au printemps de Bourges... mais c'est la seule date 2019 pour l'instant... mais bien-sûr il suffit de cliquer sur les articles précédents pour savoir tout ça et un peu plus.
Pour affronter cette disette de nouvelles fraîches, j'avais gardé quelques articles de presse non encore partagés (pour vous laisser la chance d'en profiter en kiosque). Alors voici l'interview de Rock and Folk paru en novembre 2018 (n°615 avec Bowie en couv). J'ai fait bien-sûr mon possible pour faire des photos pourries… mais c'est lisible sur PC.
On y retrouve un Murat délié avec quelques petites phrases, se plaignant par exemple d'avoir filé son disque à un pote musicien et que celui-ci ne lui ai fait aucun retour par exemple. [Ah, Jean-Louis, ils ont été nombreux à en parler de ton disque, et récemment Charlélie Couture)
PS: J'ai beaucoup alimenté ce blog durant les premières années avec les "en direct des tuyaux ouverts", l'actualité youtubesque souvent constituée des archives de M. Five'R. Je rappelle que mon blog et celui de Didier lui doivent beaucoup (il nous a permis d'accéder aux archives que l'on a exploitées… Didier a tous lu, moi pas). En ce moment, Five distribue quelques archives télé en "privé" dans le groupe facebook "Jean-Louis murat". Vu que c'est privé, je ne peux les partager ici, mais je vous informe. Elles peuvent réjouir les amateurs de playback et du Murat minet (on peut l'apercevoir en costume et pantalon à pince…)… mais il y a a aussi un live de 84 écoutable sur Dailymotion (en fin d'article).
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LE LIEN EN PLUS POUR CAUSER CAUSER
Murat n'a pas toujours été celui qui ne jurait que la production américaine (de Lamar en passant par Dylan, et le blues et la soul). Durant un moment, il évoquait les Pale Fountains, Prefab Sprout (jusqu'à en prendre le batteur Neil Conti). Un grand nom de ce courant musical est décédé ces jours-ci, je veux bien sûr parler de Mark Hollis, de Talk Talk qui avait acquis un statut d' "artiste culte" puisque son retour était une des arlésiennes les plus fameuses de la pop. Murat avait envisagé (avec la maison de disque) de travailler avec leur producteur: Tim Friese-Greene. Ici dans Rock and Folk (1992):
Dans le fameux article de Libération "au pays de Murat" d'oct 91 qui relate la fabrication compliquée de l'album du Manteau:
- Prefab Sprout, écouté en boucle durant l'été par Murat ("Pour nous, auteurs de chansons, Paddy McAloon, c'est l'horloger ...") ; Virgin propose aussi Brian Eno (option atmosphérique). Indisponible, celui-ci répondra par voie de courrier. Murat n'est en tous cas pas si chaud pour Dolby. "Peur de faire chic. De sonner comme un Brian Ferry à la française."
Il pencherait, lui, pour Tim Friese-Greene, qui givre élégamment les disques de Talk Talk ... Et après tout, il ne penche pour personne -- que lui-même.
- Toujours pas question de producteur. Sans doute pour plus tard. Pour le mix final. Friese-Greene, qui traverse l'Afrique à pied, a envoyé une lettre ("Si vous avez fait Cheyenne Autumn tout seul, vous pouvez vous démerder tout seul !").
Murat se remet au travail.
AVRIL. Après hésitation et négociations du côté de Ian Broudie, François Kevorkian, Stephen Hague, c'est finalement Julian Mendelsohn, producteur, entre autres, des Pet Shop Boys, qui apporte sa touche (discrète) à l'album. L'Australien n'en rajoutant pas, les deux hommes s'entendent et passent une dizaine de jours à peaufiner l'ensemble dans les studios ZTT. Au passage, le producteur, plutôt sollicité ces temps-ci du côté "dance", se laisse aller à une opinion sur le travail du frenchy : "En Angleterre, c'est le genre de musique que tout le monde voudrait entendre mais que personne n'achète."
Dans la non moins célèbre (si quand même un peu moins) interview dans les Inrocks de 91 (par C. Fevret), Murat évoque Talk Talk comme une influence majeure du manteau de pluie.
L'impression de faux plat tient au rythme, en l'occurrence ce mid-tempo insistant et confortable, qui domine tout l'album.
J'aime bien les chansons qui sont menées sur le ton de la conversation, ou d'un échange amoureux. Dès que le tempo est un peu élevé, les chansons te stressent. Le beat parfait, c'est le battement du cœur. Sorti du battement du cœur, je me sens gêné : j'ai l'impression d'avoir une démarche strictement commerciale lorsque j'accélère le tempo. Je pourrais dire tous les textes de l'album tranquillement, sans chanter. Ce tempo lent se trouve sur beaucoup de ballades de rhythm'n'blues. Tous les gens que j'aime bien, les Otis et les Sam Cooke, travaillaient dans ces eaux-là. C'est le tempo de l'amour. Moi, je ne fais que des chansons d'amour et on ne peut pas parler d'amour sur un rythme de lapin mécanique. Ce que j'aime bien chez Neil Conti (le batteur de Prefab Sprout jouant sur Le Manteau), c'est qu'il a le son de caisse claire du batteur d'Otis Redding, Al Jackson. Dans mon biberon, j'avais cette musique et cette sonorité. Ces trucs de rhythm'n'blues mais aussi Wyatt, Cohen : j'aime ce qui n'a jamais été à la mode. J'en reste aux mots, aux mélodies, aux arrangements qui vont toujours dans le sens des mots et à l'efficacité de la rythmique, sans qu'elle soit omniprésente. Mais pour moi, le grand exemple, c'est Prefab Sprout et Talk Talk. A Pessade, pour le travail sur Le Manteau, je n'avais que leurs disques, je voulais viser entre les deux. Je trouve que les mots français vont très bien sur ce genre de choses.
Fais-tu un complexe vis-à-vis des Anglo-Saxons ?
Dans Johnny Frenchman, sur Passions privées, je dis "Attends que la crinière pousse au lionceau", je parlais pour moi. Cette chanson était au départ une lettre ouverte à Costello, car j'avais lu une interview où il nous traitait de minables. C'était à l'époque des Pale Fountains : d'un seul coup, je sentais quelque chose de neuf, que je pourrais aller dans cette direction. Je voyais les Anglais comme des voyageurs modernes, avec une langue invincible mais je leur disais "Attends que la crinière pousse au lionceau", je sentais qu'il faudrait du temps. Ça peut s'apprendre, il faut avoir des connaissances en art poétique, aimer la grammaire, le vocabulaire, écouter beaucoup de musique, trouver son rythme à soi, ne pas se précipiter. J'avais conscience de partir de très loin. Un peu comme le retard de la renaissance française sur la renaissance italienne.
Dans Purjus.net en 1992:
Talk Talk - "Laughing Stock"
Un disque de base, quoi. Y'a tout dedans. Ca m'a beaucoup changé ce disque-là. J'ai envie de faire des trucs comme ça après. j'avais contacté Tim Freezegreen, marc Hollis ça me disais rien, mais Feltam, et Harris le batteur. J'aurais aimé travailler comme ça.
Certains continueront de parler de Talk Talk même pour Mustango:
Dans le Temps (Suisse): Pourtant, malgré ce goût pour les caresses un peu rudes de la musique américaine, les ballades de Murat évoquent plus souvent l'univers éthéré d'artistes tels Talk Talk, Blue Nile ou David Sylvian.
Murat en 2016 dans une playlist pour RTL avait choisi de nous faire écouter : living in another world.
Pour la petite histoire, Murat a peut-être joué du Talk Talk lors d'un concert caritatif (pour la Roumanie): il a joué en effet avec le groupe Steve Mac Queen constitué notamment des copains Alain, Jérôme et Stéphane (les mêmes qui accompagnent Murat dans la vidéo de 84 visionnable ci-dessous). C'est Matthieu qui nous en causait avec des archives inédites:
En la circonstance, ce nom doit nous évoquer autant le célèbre acteur américain que l'album éponyme de Prefab Sprout sorti en 85. En effet, le groupe clermontois, monté en septembre 89, compte notamment à son répertoire, en plus de ses propres compositions, des morceaux de Prince, Simply Red, Talk Talk, Joe Jackson ou, justement, Prefab Sprout [ …] On ne connaît pas la setlist du groupe ce soir-là, mais on peut supposer que Murat préféra jouer des reprises plutôt que ses propres morceaux et qu'il puisa dans le répertoire habituel de Steve McQueen. On sait par exemple qu'il interpréta, les mains enfouies dans les poches de son grand manteau, "It's only love", dans une version plus proche de la reprise des Simply Red que de l'original de Barry White.