Murat, de la Musique de supermarché?
Publié le 24 Juillet 2013
J'ai repensé l'autre jour...en entendant une chanson de Murat ("sans pitié pour le cheval" me semble-t-il) diffusée dans mon supermarché Casino à un mail que j'ai reçu durant l'été 2012: Emmanuelle m'informait qu'elle avait écouté du Jean-Louis Murat dans son hôtel Campanile de vacances. Oui, je reçois des mails importants parfois...
Vous êtes nombreux, comme moi et Emmanuelle, à écouter du Murat pendant vos vacances... mais là, n'est pas la question. Emmanuelle a été intriguée par ce choix musical de l'hôtel, et a posé la question au réceptionniste. Celui lui a expliqué qu'une société prestataire lui envoyait, comme aux autres hôtels, des CD.
Sur ce fait, j'ai encore oublié... Vous savez : priorité à la liste des courses, pour ne rien oublier, et pas se faire engueuler en rentrant... Mais... Mais... j'y ai finalement repensé l'autre jour, en entendant... non pas une chanson... mais deux chansons de Murat ("sans pitié pour le cheval" me semble-t-il... et les "rouges souliers") dans mon supermarché Casino (je fais du placement de produit... mais sans contrepartie, promis) et cela en 20 minutes de temps (c'était juste un ravitaillement de fin de semaine... Je suis précis...).
J'ai moi-même alors bravé le mur virtuel entre le client et la caissière acariatre au prise avec son rituel du SBAM (Sourire, bonjour, Au revoir, Merci...) ou plutôt du SBACM ( (Sourire, bonjour, Carte du magasin, Au revoir, Merci...) et posé la question de savoir qui leur fournissait la musique.
J'ai ainsi eu droit à une réponse implacable:
"Et bien, c'est RADIO CASINO! C'est nul...". J'ai récupéré mes bons de réduction... et j'ai lâchement laché l'affaire en détournant les yeux du regard inquisiteur de l'agent de sécurité... qui me surveillait de près depuis qu'il m'avait vu errant dans les rayons en tapant du pied (oui, je sais marcher tout en tapant du pied).
C'est suite à une tweet m'informant -nous sommes désormais en juillet 2013, le temps passe vite, c'est fou - que Murat a été diffusé dans un Framprix parisien... que j'ai décidé de reprendre mon enquête de haute investigation.
J'ai interrogé le groupe casino afin de savoir avec quelle société ils travaillaient, mais je n'ai hélas pas eu de réponse.
Ils existent en effet, des sociétés spécialisées de "marketing sonore".. voir "sensoriel" ou même "design musical" comme celle-ci http://www.mediavea.com/references.php proposant non seulement des CD mais aussi des systèmes de diffusion connectés. Simplicité... et point de souci avec la SACEM (il y a quelques années les hausses du prix avaient suscité le mécontentement des commerçants)... La diffusion de musique dans son échope n'est en effet pas un acte gratuit... et il parait pas si anodin... et Il est donc tentant de faire sous-traiter ça...
" L’influence de la musique est d’autant plus efficace qu’elle est perçue inconsciemment par les consommateurs. Ainsi, sur les points de vente, il est important d’utiliser les techniques du marketing sonore. L’utilisation de la musique dans les surfaces commerciales n’est pas récente, et diverses études ont montré que la musique influe sur la perception du temps dont disposent les acheteurs. La musique classique aurait beaucoup d’effet sur les consommateurs, et les musiques connues du moment auraient des impacts importants sur le temps passé sur le point de vente et les sommes dépensées. Une musique douce incite ainsi à la flânerie, tandis qu’une musique plus dynamique rend le client plus pressé".
http://www.netpme.fr/marketing/712-marketing-sonore.html
"On peut expliquer le succès du marketing sensoriel de différentes façons : tout d’abord, le consommateur désire une compensation face à la superficialité du monde actuel dicté par les lois du monde virtuel et d’Internet. La perception sensorielle amène un sentiment réconfortant de réalité. D’autre part, face à l’urbanisation croissante, le consommateur recherche une aventure sensorielle avec un retour à la nature et aux cinq sens. Il n’achète plus le produit seulement pour ses qualités fonctionnelles et intrinsèques, ses achats ne s’expliquent plus de façon rationnelle".
Ah, on se marre bien quand on lit des concepts marketing... qui se vendent presque comme une science: "Profilage attitudinal et comportemental des publics-cible", "analyse du customer journey, "Concevoir l'univers sensitif de la marque, c'est balayer tout le prisme des valeurs qui la fondent. A partir de sa stratégie de communication, x élabore un monde de sensations cohérent avec son image et son positionnement". - http://www.midis.com/pages/fr/musiques.php?p=1
Alors évidemment, il faut bien-sûr poser la question : Qu'est-ce que la musique de Murat fait vendre? J'ai décidé de retourner camper au Casino, et d'attendre le prochain Murat... Pour patienter, j'ai essayé de me tester sur les musiques qui étaient diffusées... Ouf, pas de Patrick Sébastien, j'avais peur d'être poussé par une force surnaturelle à acheter des sardines. J'aime pas les sardines.
Ca a commencé par du Daft Punk... je suis parti m'acheter un casque à moto... mais parce qu'il n'y avait plus de boule quies! Zaz, ensuite... JE VEUX... JE VEUX... rayon bonne humeur, mieux vaut éviter le Casino... Je VEUX... Je suis allé acheter du Baygon... C'est l'effet LES NULS : http://www.dailymotion.com/video/xylar_pub-baygon_fun#.Ue-x2s9OIic . Ensuite, de l'or en barre ? Bruno Mars, et j'ai eu envie de repartir... Mais j'ai acheté de la soupe. Je me suis dit que j'étais un mauvais client, l'aberration, la marge d'erreur statistique, au bout du compte: un mauvais français qui empêchait la croissance de revenir sur nos contrées... Je suis allé m'acheter des cotons-tiges: peut-être qu'il fallait nettoyer les écoutilles, fatiguées par des années d'écoute de musiques snobs. Y'a eu ensuite du Bob Marley... Là, ça a fonctionné, mais j'ai dû sortir du magasin pour aller au bout de la rue pour trouver ce qu'il fallait auprès d'un jeune qui lui aussi avait créé son univers sonore (non plus grâce à un guetto blaster, chers fans de tournée 80, mais d'un téléphone tactile) : un rap accueillant, propice à des échanges commerciaux courtois mais néanmoins furtifs. Je lui ai demandé s'il avait profilé attitudinalement ses customers et s'il payait la Sacem... Sur quoi, il s'est arrach"... suite à l'arrivée de la "concurrence" dérapante, qui eux ne payent pas c'est sûr pour la musique qu'ils nous permettent de ouir: le deux-ton n'est pas protégé par des droits d'auteurs.
Euh... Je crois que j'ai un peu dérapé..dans cet article que je souhaitais d'investigation... J'ai pourtant fait beaucoup de recherches: j'ai ainsi appris que la chaine d'hôtel Campanile avait depuis 2009 fait de gros efforts pour monter en gamme... d'où bien sûr la diffusion de Jean-Louis Murat!! qui a le public de la plus grande qualité qu'y soit, chers lecteurs (je vous brosse dans le sens du poil, c'est bon?).
Bon, vous avez compris que je ne prends pas trop cela trop au sérieux... Non? Car en fait, j'ai interrogé Alain Artaud, interviousetmuratisé qu'il est (là), et l'ancien Directeur général de Polydor m'a confirmé ce dont je me doutais: Universal avait des contrats avec certaines de ses maisons afin de faire diffuser ses musiques. Avec quelles contreparties? Et ses sociétés concoivent-ils réellement leur programmation en prenant en compte des données mercantiques? Vous le saurez dans la deuxième partie de CAPITAL... euh, non... car je n'ai déniché aucun élément supplémentaire. En tout cas, peu de chance d'entendre du PIAS qui n'a pas la force de frappe d'Universal dans sa distribution (au fait, Toboggan n'est toujours pas disponible à la Réunion).
Je vous présenterai prochainement (peut-être) un dossier sur le marketing olfactif (oui, c'est sérieux, ça existe)... afin de proposer à Jean-Louis de diffuser des odeurs de Saint-Nectaire au cours de ses concerts, le salers étant analysé trop clivant et jugé peu compatible avec le CSP+, les mécanismes synesthésiques du Salers sur le cadre étant mal évalués.
Pierrot toujours sur le coup... (enfin, de temps en temps).
DERNIERE MINUTE (EDIT):
Casino a décidé de stopper la musique dans ses magasins!! Je publie un article et le lendemain, Casino informe de sa décision... ;.)
http://www.rue89.com/2013/07/26/cher-casino-merci-silence-244572
Merci Emmanuelle (elle n'écoute pas que de la musique dans des hotels... elle lit aussi!)
Pour en savoir plus:
http://www.agence-cadence.com/index.php5?p=agence
http://www.sounddeezer-distribution.com/marketingsonore
http://www.marketing-professionnel.fr/tribune-libre/marketing-sonore-coherence-identite-09-2010.html
Un blog très ancien consacré à ce sujet:
http://sensoblog.com/2012/11/20/20121120quel-marketing-sensoriel-pour-le-point-de-vente/
Le marketing sensoriel peut néanmoins s’avérer nuisible à la relation entretenue avec le consommateur si celui-ci vient à l’interpréter comme un moyen de le manipuler.
http://sensoblog.com/2010/09/14/20100914pourquoi-creer-une-ambiance-musicale-sur-le-point-de-vente/ :
Quelques cas concrets d’ambiance musicale dans le point de vente. Certaines enseignes refusent l’utilisation de musique dans le point de vente. C’est notamment le cas d’Auchan par une volonté du fondateur. D’autres déploient un concept de radio privée instore dans une optique media : informer le consommateur tout en proposant une ambiance musicale « très grand public » (ex. Casino, Match, etc.). Enfin, certaines enseignes ont créées en interne leur propre studio (cf. Fréquence Mousquetaires), jouant en plus le rôle de régie publicitaire et de « journal interne » au groupe.