Franck Courtès photographe (suite)
Publié le 7 Juin 2016
Les meilleurs sont les plus courtes... mais j'ai envie, pour être exhaustif, de prolonger un peu la dernière Inter-ViOUS ET MURAT avec le romancier Franck Courtès. Dans la vie d'avant, il était photographe.
1) Sa première session avec Murat:
Franck nous a raconté ainsi sa première rencontre avec Jean-Louis à New-York:
"J'ai photographié J.L. Murat à New-York la première fois, dans un grand loft d'artiste intimidant qu'on lui prêtait. On a regardé ensemble mon travail le soir, et il m'a avoué préférer de loin mon travail personnel qui est une sorte de journal intime en photo, plutôt que mon travail de commande où apparaissait de nombreuses personnalités connues en train de faire leur promo. On était bien d'accord sur le côté vain et parfois pathétique de ces gens qui ne cherchaient qu'à paraitre le plus beau, le plus séduisant possible. Il est impossible d'y résister, même les personnes les plus dignes s'y vautrent. C'est bien pour cette raison que je pense qu'il faudrait en finir avec ces beaux portraits d'écrivains, de musiciens, de politiques. En tout cas, moi, j'ai arrêté (en même temps que le sucre d'ailleurs, c'est drôle, non ?). Bref, J.L. Murat et moi, on partait en silence sur de bonnes bases, parce qu'on était sans s'embêter à le dire, bien d'accord. On a bu et il a fini à poil dans le lit avec sa guitare ! Habituellement c'est le genre d'idée qui vient aux filles, ça m'a plu ce pied de nez à la promo, car évidemment les photos n'étaient pas publiables...".
Pas publiables?
Sur le net, on trouve la photo ci-contre avec mention de Franck COURTES/Labels, sur un article de RFI. Elle est présente dans quelques articles de l'époque, comme dans Cosmopolitan:
Mais est-ce la seule photo exploitée?
Murat nu dans un lit? J'ai bien sûr pensé à cette photo:
Un autre cadrage pour BEST d'octobre 99 et Platine :
Elle illustrait la couverture du supplément des Inrocks "Murat en Amérique"... L'auteur est crédité à gauche.
- Et voilà que je découvre au cours de cette deuxième recherche dans les archives, ce qui m'avait échappé... une dernière photo... de Murat dénudé... Le nom de Franck Courtès est indiqué en haut. C'est dans TETU de Janvier 2000:
Ceci nous permet donc d'identifier sans doute l'auteur de cette photographie-ci également (dans TéléMoustique mars 2000)
J'ai cru un moment que les photos présentées sous forme de montage (ci-dessous) dans quelques articles et dans cette couverture de Longueur d'ondes, pouvaient être issues de cette même session... mais il s'agit d'autoportraits.
Jean-Louis ira plus loin cette même année là, en se dévoilant entièrement nu dans le numéro d'octobre 2010 de Magic (autoportrait en pied... si j'ose dire).
2) La session à DOUHARESSE
"En Auvergne, c'était autre chose, il m'a fait écouter des démos magnifiques, il est une source inépuisable ! Et puis il a plongé ses mains dans une mare pour me montrer des oeufs de grenouille, on buvait de la tisane à la reine des prés, et il me répétait que c'était pas rien pour une plante, de s'appeler "reine des prés", qu'on devait y prêter attention. Et puis ma voiture n'a jamais voulu redémarrer, et on a fini les mains dans le moteur avec les pinces crocodiles. Sans lui, je ne repartais pas. C'était tout un symbole pour moi que Murat, avant de partir me refile de l'énergie, m'aide à redémarrer, mais je ne lui ai pas dit. Mon petit moteur intime tourne encore en partie grâce à lui..."
Dans les 6 photos inédites qui illustraient l'interview de Franck Courtès, 2 sont parues dans Magic en 1999, avec un ton jaune orangé (d'où ma question sur les filtres), mais j'ai trouvé également celle-ci, dans PLATINE de la même année, avec le même blouson de cuir. La photo est également dans le Murat en Amérique des inrocks (25/08/99).
et dans Nice Matin.
Dans le magic, une autre photo (plan large de celle-ci). Je regrette de ne pas l'avoir reçue de l'agence Vu'. Avec les montagnes derrière, un faux air de James Dean du Sancy :
Voilà ainsi reconstitué l'ensemble des portraits de JLM signés Franck Courtès... du moins ceux qui ont été publiés (des photos inédites de Jean-Louis, il y en a sans doute autant, si ce n'est plus à découvrir, que d'inédits dans la malle du grenier: il effectue un contrôle strict... au grand dam de Frank Loriou par exemple... qui se voit obligé de conserver quelques "trésors").
On peut juste remarquer qu'au moment où il fait deux rencontres avec des photographes qui vont l'aimer au plus haut point (Franck Courtès et Frank Loriou, ce dernier pour l'instant certes cantonné à l'artwork du disque mustango), Murat commence à préférer délivrer ses autoportraits et ses peintures pour illustrer des articles. Faut dire qu'on lui a aussi infligé au cours de cette promotion de Mustango
:Rock and folk... qui justement ne parlera plus de Murat sous prétexte qu'il refuse les photos...
Autre rencontre importante: Les photos crédités dans "murat en amérique" sont signées "L.D." qui deviendra ensuite LB... mais c'est une autre histoire, et une longue, celle-ci.
3) Quelques mots et photos sur la très belle carrière de photographe de Franck.
Dans l'interview, j'évoquais deux prix nobel dont Modiano. L'autre était Nadine Gordimer. Ci-dessous l'article de libé de 2002 :
"Oui, il y avait une véritable empathie pour les gens dans mes photos, parce que j'en ai beaucoup dans la vie en général. Je suis assez admiratif des gens, j'ai toujours l'impression qu'ils ont des qualités que je n'ai pas. Il m'arrive d'aimer quelqu'un alors même qu'on est pas d'accord, juste parce que son raisonnement est sincère. J'aime beaucoup la sincérité, même si l'idée exprimée ne me plait pas entièrement. Maintenant, est-ce qu'il y a un art de l'empathie, je ne pense pas. Il n'y a pas d'art de tout. Etre dans l'empathie n'a pas grand chose à voir avec l'art. J'ai connu de très bons portraitistes qui méprisaient leurs sujets. Leurs photos étaient vraiment belles quand même. Disons qu'avec moi, il y avait de l'amour pour mon modèle, et s'il n'y en avait pas de prime abord, j'avais tendance à en rechercher".
D'autres portraits d'écrivains ici... disponible dans un livre (25 euros, pas cher pour 250 clichés).
Le site de l'agence Vu' laisse découvrir beaucoup d'autres oeuvres... des portraits (on trouve Benjamin Biolay, Keren ann, Tom Hanks -couverture Optimum en 98-, Nick Cave, Brian Molko, Massive Attack, ou l'ami de JL, Eric Reinhardt.. et encore une très belle photo d'un Michel Serrault patibulaire).
On trouvera enfin, notamment pour les lecteurs de son dernier livre "Sur une majeure partie de la France", de touchantes séries ("son "journal intime") : "Chroniques de vacances, Verdon", un Verdon dans la Marne, nettement moins touristique que les gorges du sud de la France et un "secrets de famille" de 2008 qui renvoit aussi à "Toute ressemblance avec mon père". Elles convaincront tout le monde que Franck Courtès photographe n'est pas seulement un portraitiste.