BABEL prog' ?(mais pourquoi tente-t-on de répondre parfois à des questions à la noix)
Publié le 13 Mars 2015
(un article que j'avais sous le coude... et que j'ai enfin réussi à bâcler ce soir).
Un ancien facteur d'Orcival (il faudrait un jour que je fasse un éventaire à la Prévert des fans...) m'a informé d'une belle chronique de BABEL sur un site consacré au rock progressif (vous la découvrirez ci-dessous). Comme l'occas' fait le lar' (surtout avec moi), et que le qualificatif de "progressif" a déjà été accolé à BABEL, ce dont je n'ai pas manqué de m'étonner, je me suis dis que cela méritait qu'on s'y arrête. Commencer 2015 en parlant de progrès, qui plus est, c'est un bon présage ! (j''ai commencé à rédiger cette introduction avant le 8/01, note personnelle : mieux vaut abandonner l'idée de se réorienter comme voyant extralucide).
A
1) Le figaro a évoqué deux fois le "folk progressif" :
"Babel constitue un nouveau sommet dans le parcours de cet original, puisque pour la première fois, il est accompagné par un groupe existant à part entière: The Delano Orchestra. Emmené par Alexandre Rochon, ce collectif de Clermont-Ferrand a mis au point un folk progressif du plus bel effet". http://www.surjeanlouismurat.com/2014/10/dans-le-live-le-figaro.html
Un disque qui marque un aboutissement dans sa carrière, Jean-Louis Murat s'étant fait accompagné par un groupe existant à part entière, The Delano Orchestra, dont le leader est à la tête du label clermontois Kütü Folk Records. De quoi façonner ensemble un folk progressif du plus bel effet, toujours accompagné de l'écriture soignée de Jean-Louis Murat, sa véritable marque de fabrique. http://www.surjeanlouismurat.com/2014/12/la-chronique-de-baptiste-vignol-et-dans-le-figaro.html
Dans la première citation, on peut penser qu'il s'agit de qualifier la musique des THE DELANO ORCHESTRA en général. Les envolées musicales, les crescendos, l'orchestration riche et le lien avec la musique classique (souligné sur le 3e album) les rapprochent en effet de ce style.
B
Faudrait peut-être déjà se mettre d'accord sur le terme "progressif".
Que dit Wiki du rock prog?
- Puisant dans une multiplicité de genres dont le jazz, le blues et la musique classique, il se révèle particulièrement élaboré au niveau de la technique instrumentale, de la composition, des textes ou encore des artworks. Il se distingue également par la longueur de ses morceaux, la promotion de l'album-concept (avec la mise en valeur artistique des albums -illustrations, graphisme, photo-) et la volonté plus ou moins importante de s'éloigner du circuit commercial et de son formatage.
C’est une musique très élaborée au niveau de la composition, des textes et de la technique instrumentale.
Les principales caractéristiques propres au rock progressif sont :
- la complexité musicale dans la composition. Les thèmes peuvent varier de nombreuses fois au cours d'une chanson et ne se limitent pas au simple schéma couplet/refrain/couplet que l'on retrouve dans le rock par exemple ;
- la présence de longues parties instrumentales, n'étant pas nécessairement des improvisations mais aussi des passages travaillés instrument par instrument. Certains groupes, principalement dans les années 1970, produisaient exclusivement des chansons instrumentales ;
- l'indépendance de la section rythmique (basse et batterie, le plus souvent) ;
- l'influence de la musique classique, du jazz, de la musique contemporaine, musiques ethniques, de folk, de musique médiévale ou d'airs traditionnels "
- Sur un blog spécialisé: "Le terme "progressive rock" recouvre bien souvent diverses appellations barock rock ou bien classical rock. Il est employé pour la première fois en 1967 à propos de l'album Days of Future Passed des Moody Blues".
Concernant Le Folk Progressif, on trouve sur Wiki que "c'est une partie assez importante du rock progressif qui trouve ses origines dans la scène folk rock psychédélique aux États-Unis à partir de la deuxième moitié des années 1960. Ce mouvement apparait officiellement aux débuts des années 1970 en Angleterre avec des groupes comme Jethro Tull ou Gentle Giant mélangeant rock progressif avec musique folk, allant parfois jusqu'à des albums concept tel que Thick as a Brick de Jethro Tull en 1972 ou encore Three Friends de Gentle Giant la même année. Au Canada, le groupe franco-ontarien Garolou propose dès le milieu des années 1970 des pièces musicales telles que Germaine et À la claire fontaine qui se veulent un mariage savant de musique progressive et folklorique. La pièce Un bon matin est également un bon exemple du mélange des deux genres".
Jethro Tull, Murat en parlait avec LANG en 2009 (de RTL)... Il les a vu en 70 sur l'ile de Wight ("c'était fascinant"). Dans la même émission, il avait choisi d'écouter également Family, classé prog aussi dans Wiki. C'est ce fameux groupe qui aurait fait l'objet d'un de ses rêves, rêve qu'il a pris comme un signe, lui révélant sa vocation (il raconte l'anecdote dans l'émission).
Dans les goûts de Murat, on trouve d'autres artistes parfois rangés dans le "prog":
- ANGE: http://www.foutraque.com/inter.php?id=63 Tu n’as jamais écouté Ange !
Si, tu rigoles ? J’ai vu Ange, t’étais pas né ! Il y a un côté Ange chez Dionysos, qui est assez sympa…
- MALICORNE:
Malicorne...: C’est surtout grâce à ses polyphonies étranges et personnelles, ses arrangements électroacoustiques subtils et le choix d’une instrumentation hybride que Malicorne reste la référence en France du style folk rock progressif. Nombreux sont les musiciens qui en reconnaissent l’influence. François Hadji-Lazaro, Stephan Eicher et Jean-Louis Murat en font partie.
- Et Robert WYATT :
http://www.idem-mag.com/jean-louis-murat-2/
Justement vous êtes inclassable, vous le fan de Robert Wyatt, avez écrit là un album éclectique où folk, jazz prog, blues se côtoient comme dans son univers…
Oui, c’est un peu plus proche de sa musique que j’aime en tous cas. Le travail en solitaire m’a permis de me rapprocher de ce que j’aime un peu comme procédait Robert Wyatt qui est une grande influence.
Parfois très structuré blues au niveau du groove vocal ou instrumental (slides), vous brouillez les pistes et revenez à une sorte de synthèse jazz rock progressif, ou encore folk, ou carrément des distorsions ?
Si vous retrouvez tout ça, alors je suis très content. Instinctivement lorsque je prends une guitare ou me met au piano, la forme musicale qui m’attire en premier c’est toujours le blues mais j’aime beaucoup le jazz et les libertés instrumentales. Si vous ressentez ça alors ça veut dire que j’ai pu me lasser aller à faire ce que j’aime vraiment. C’est sûrement pour moi le travail le plus personnel qui colle parfaitement à la sphère musicale que j’aime.
Au départ de cet article, je me disais que Jean-Louis ne goûtait guère le "progressif" puisqu'il ne cite pas disons de Pink Floyd, de Genesis, ou Marillion, dans ses goûts, une musique qui s'éloigne sans doute trop du blues ou qui peut virer à la caricature (Une fois la caricature du prog faite, on a pu passer à autre chose..). On a vu néanmoins qu'il aimait certains artistes qui sont classables (en partie; ça se discute; ) dans ce style "prog"...
Murat interviewant Wyatt pour TELERAMA: J.-L.M. : Vous avez fait partie d'un des plus célèbres groupes de rock dit " progressif ", Soft Machine. Quelle a été votre éducation musicale ? R.W. : J'étais batteur, donc très intéressé par le jazz, qui me semblait plus riche, rythmiquement, que le rock. J'adore Charlie Mingus, mais aussi des compositeurs classiques comme Ravel ou Prokofiev. Et de grands chanteurs aussi, comme Roy Orbison ou Brian Wilson - bien que je déteste la rythmique des Beach Boys. En fait, je n'ai écouté le rock ou la pop qu'à travers des juke-boxes, ou dans des festivals où nous jouions. Avec Soft Machine, je suis entré dans une phase de ma vie qui m'échappait. J'étais ivre mort du matin au soir. J'avais l'impression de nager à contre-courant. D'ailleurs, j'ai tout oublié de cette période. C'est comme un grand trou noir ... (Télérama sept 97).
NB:Murat intervient dans une série d'émissions consacrée à Wyatt (là) rediffusée il y a peu. Oomiaq me l'avait signalé..
C
ALORS, BABEL Prog'?
...
Enfin soit, on va quand même tenter d'offrir une réponse à la question posée en reprenant les éléments qui définissent le progressif.
Evoquons rapidement en premier lieu:
1) Esthétique art'work et concept
Même si ce n'est pas le plus important, "Les illustrations, l'art work, l'album concept" sont un élément pouvant définir le prog. Pour moi, Babel ne répond pas totalement au critère. Certes, la géolocalisation, le fait que ce soit un double album, pourrait faire évoquer l'album concept... mais c'est plus du "storytelling" qu'une ambition artistique de l'album. Thématique est un mot trop sérieux. Le thème pourrait être : « qu’est-ce que je fais, là où je suis ? ». J’aime étudier le rapport entre la géographie et l’histoire. Je chante simplement mes racines auvergnates. Ça ne va pas plus loin que ça, je crois (avec Mandor).
"
2) Musique
Babel est assez riche orchestralement dans l'intrumentation et les styles (jazz, du blues...) et bien sûr la mise en avant d'instruments classiques (le violoncelle bien sûr), mais les compositions par leur simplicité l'éloignent du style "prog". Les morceaux sont longs, mais c'est lié au texte, plus qu'à la musique. Murat a dit lui-même qu'il avait voulu quelque chose de simple tant au niveau de la musique que des textes d'ailleurs: "j'ai composé sur 3 ou 4 accords". Donc pas de variations thématiques dans une même chanson, pas de pont-viaduc de Millau au milieu d'un titre. Le titre "MUJABE RIBE" et ses 8 minutes 55 est bien sûr une chanson épique, mais, même si l'orchestration est belle, la construction me parait simple (je n'échappe pas toujours à son écoute à l'ennui d'ailleurs).
Malgré tout, du folk un peu barré, dans les plus belles réussites de l'album, il y en a. Dans la direction du Crest, avec son banjo, sa trompette libre, ses stridences de guitare électrique, les ponctuations de piano, et ses belles envolées... et sur plus de 7 minutes. + 1 point.
L'autre titre qui rapporte des points, c'est Passions tristes à mon avis. Pour le coup, on a une intro un peu longue ou la trompette nous emmène un peu loin, avant que le chant avec ses "je n'aime pas" scandés nous amène à autre chose. Le refrain est aussi différent... et tout au long de la chanson, l'orchestration est très variée, avec la flute, la trompette, des guitares et le violoncelle. + 1
D'autres points à créditer ? Je n'en vois point. Du jazzy ("chant soviet"), du folk limpide ("la chèvre alpestre"), du blues bien sûr... et "tout simplement" (le plus difficile) des "ballades": Long John, Vallée des merveilles, tout m'attire... des chansons... en réaction contre la marche du temps. Réaction/progrès? C'est une autre histoire...
LA CHRONIQUE DE BABEL sur le site consacré à la musique progressive:
http://clairetobscur.fr/jean-louis-murat-delano-orchestra-babel/#comment-32630