Pour obtenir une accréditation-presse pour la première fois, je me suis laissé soudoyer par l'attachée de presse pour faire un article pour annoncer le festival : LES BELLES JOURNEES, "festival de rock indé" à Bourgoin-Jallieu, le 11 et 12 septembre, au parc des Lilattes, première édition...
En réalité, j'étais tellement content de découvrir cette initiative de ma métropole micro-régionale, et surtout cette programmation, que j'avais déjà facebooké sur l'événement et invité mes contacts lyonnais à l'événement. C'est tout naturellement que j'allais bien sûr en parler aussi sur le blog, et faire ma petite part pour promouvoir l'événement... d'autant plus que j'espère réussir à vous proposer quelques contenus exclusifs... notamment une petite surprise aux lyonnais (un petit clin d'oeil au musicien Jean-Louis Bergheaud qui faisait le reporter musical... mais chut). Vous n'avez donc pas fini d'entendre parler du festival ici-même...
Et voilà que... alors que je prenais contact sur facebook avec le programmateur du festival afin d'en savoir plus sur le concept de "rock indé", et ses choix, celui-ci m'apprenait qu'il avait été très fan de Murat, qu'il était un ancien de Virgin... et...et... qu'il avait eu son quart d'heure de "célébrité muratienne" (une petite minute en fait)! C'est dans cette vidéo à partir de la 5e minute:
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Oui, le programmateur du festival LES BELLES JOURNEES est:
LAURENT TOQUET dont Ruquier lit une lettre publiée dans les Inrocks dans cette émission de 2006.
Voici donc sa mini "inter-ViOUS ET MURAT".
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eParc des lilattes
en configuration concerts estivaux, ou virades de l'espoir (les services techniques sont rôdés).
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Interview:
- Alors, bonjour Laurent Toquet, avant d'aborder le festival, vous m'obligez à évoquer Murat... Quelle est votre histoire avec Murat?
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Mon histoire avec Murat remonte à bien longtemps, en 1987 exactement. A cette époque, je travaillais comme disquaire à Lyon chez Jelmoli exactement.
J'avais commandé ce 45 tours: "Si je devais manquer de toi" au commercial de chez Virgin qui connaissant bien mes goûts musicaux, m'avait préciser que l'univers de ce chanteur, Jean Louis Murat, devrait me plaire. Et en effet, ça m'a beaucoup plu et j'ai du en vendre pas mal à ma clientèle, car je le passais en boucle dans le magasin. Après, j'ai systématiquement commandé tout ce qui sortait de lui, pour mon plaisir et pour le magasin aussi.
En 1988, je quitte mon poste de disquaire chez Jelmoli pour aller travailler en tant que commercial chez la maison de disques Virgin France.
Je viens donc de réaliser mon rêve de l'époque: travailler pour ma maison de disques préférée qui distribue tous les labels que j'aime: Virgin, 4AD, Beggars Banquet, Mute, Rough Trade...
Dans le cadre de mon boulot, je reçois donc tous les disques qui vont sortir avant tout le monde, pour les faire écouter aux disquaires en avant première et les motiver sur les projets.
C'est ainsi que, jusqu'en 1992, je vais beaucoup parler et écouter du Murat au fil des sorties de ses disques, je vais le rencontrer aussi quelques fois rapidement au siège de chez Virgin,
place des Vosges à Paris, mais il n'est pas très bavard à cette période, pourtant nous avons une grande passion en commun: le vélo et tout ce qui touche au cyclisme en général.
En 1992, je quitte Virgin pour aller travailler chez Universal, mais je continue à me procurer les albums de Murat à chaque fois qu'il en sort un (et dieu sait qu'il est prolifique l'animal).
J'ai commencé à décrocher un peu début 2000, car je trouvais que sa production baissait très nettement en qualité et qu'il ne se remettait guère en questions, pour revenir vers
lui ces dernières années, trouvant sa production à nouveau intéressante, mais ses disques ne me procurent plus tant de frissons et d'émotions que ceux des années 90.
Faut dire que j'ai vieilli, lui aussi... Voilà!
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- Petites questions rituelles: Votre album préféré? si vous pouvez me citer 3 chansons? et bien sûr pourquoi ce choix?
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Sans aucune hésitation: DOLORES.
Tout me touche dans ce disque à fleur de peau. Du moindre mot à la pochette, je me sens complètement en osmose avec cet univers mélancolique et poétique.
Son écriture est fine, originale, la production musicale impeccable, tous les instruments se complètent parfaitement, c'est beau, totalement maîtrisé tout en étant un peu fou. Quel disque!
Après j'aime presque autant: Le manteau de pluie, Vénus et Mustango et le live in Dolorès couplé avec le Murat en plein air.
Chansons préférées:
Très difficile à choisir pour moi, il y en a tant que j'adore.
- "Perce-Neige" pour ce rapport incroyable avec la nature, les animaux, le climat et les états d'âme d'un homme tellement lucide, ici étalés toutes en finesse, qui se dégagent de ce titre.
- "L'éphémère" parce que personne ne sait parler des femmes donc d'amour, de la nature et de ce qu'elle dégage comme ambiance, comme force, de l'instant d'un émoi suspendu, comme Jean-Louis Murat.
On sent chez lui une âme de "paysan", je pense que j'ai la même que lui, alors forcément cela nous rapproche.
- "Avalanche" cette reprise de Cohen est absolument envoutante, étonnante, très éloignée de l'original, complètement revisitée, c'est très fort car l'original est un chef-d’œuvre et Murat en a fait une nouvelle chanson.
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Photo L. Toquet (collection personnelle)
- Dernière question rituelle que j'allais oubliée: un souvenir particulier de concerts? une anecdote?
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- C'est simple: le 20 décembre 93 au Transbordeur à Lyon, au bout d'un certain temps et d'un concert un peu soporifique (Murat a l'air très fatigué), l'ami jean-Louis fait entrer sur scène l'actrice Elodie Bouchez, toute jeune à l'époque, elle semble vraiment intimidée, je crois qu'il chante une chanson ensemble mais je ne me souviens pas de quel titre. Puis Murat se met à parler, à délirer sur l'Auvergne, ses montagnes, sa campagne qu'il va retrouver incessamment sous peu et qui lui manquent tant en tournée.
Cela dure un sacré long moment, ses paroles sont incompréhensibles, il marmonne et semble oublier que le public est là, suspendu à ses lèvres, vraiment très déroutant.
Voilà! C'est un souvenir particulier que je n'ai pas oublié.
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- Peut-être le 23 décembre plutôt... puisque c'est le concert qui a donné lieu au disque Murat Live... Passons maintenant aux BELLES JOURNEES. Le festival se présente comme un "festival de rock indé"? Comment définissez-vous le rock indé? Est-ce uniquement d'être signé chez un petit label et Pias peut-il être considéré encore comme un petit label?
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Oui! J'ai souhaité que le festival est une ligne artistique précise (j'en assumerai les conséquence si cela ne marche pas), pour plusieurs raisons:
La première c'est d'annoncer la couleur, de ne pas avancé masqué, de se différencier des autres qui pratiquent allègrement le mélange des genres souvent n'importe comment et à n'importe quel prix.
La deuxième c'est de donner la chance à des artistes encore en "développement" qui ne sont pas très médiatisés, aussi de montrer que de nombreux groupes français de pop et de rock sont à la hauteur des anglais.
La troisième c'est que ce genre de musique est celui que je préfère et dans lequel j'ai le plus de contacts ce qui est important quand on est programmateur d'un événement.
Pour le moi le "rock indé" est une étiquette un peu bateau mais c'est tout de même celle qui définie le mieux la programmation des Belles Journées.
Ce n'est pas tant une question de label, c'est surtout une question de médiatisation. Beaucoup d'artistes estampillé "rock indé" sont sur des gros labels distribués par des Majors.
Pour moi l'indépendance commence par ne pas se soumettre au diktat des gros médias, ne pas céder à la tentation de faire n'importe quoi pour sa promotion.
C'est donc une question d'état d'esprit avant tout.
Par exemple Murat qui a toujours été (à part Pias aujourd'hui) chez des Majors du disques est complètement "indé", on ne le voit pas sur TF1, ne l'entend pas sur NRJ, il ne fait guère de concessions, assume ses convictions, c'est ça pour moi l'indépendance. Idem pour Dominique A ou Saez qui est pourtant un gros vendeur de disques.
En ce qui concerne Pias, oui pour moi c'est une maison de disque indépendante, la plus grosse certes! Mais l'on ne peut les considérer comme une Major telles Universal, Warner ou Sony.
Ils font avant tout de "l'épicerie fine" même si ils distribuent de très gros artistes et de très gros labels. Là aussi, c'est avant un état d'esprit.
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Le grand Alice Botté(avec Higelin) au Parc des Lilattes en 2013
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- vous le soulignez, sans parler des risques météo de faire un festival en extérieur en septembre, vous avez fait un choix exigeant... sans un très grand nom (disons des personnes qui ne font pas que la couverture de magic! Vous avez cité vous-même 3 artistes assurant une certaine affluence ou retentissement médiatique). Est-ce que vous avez pensé inviter un de ces chefs de file ?
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Il est évident que la météo va jouer un rôle important, mais c'est un risque à prendre, comme dans tous les festivals qui se passent en plein air. Espérons que les cieux nous seront cléments ces deux soirs là, donc que la chance sera de notre côté. Si nous n'avons pas un très grand nom comme vous le précisez, c'est uniquement pour deux raisons: beaucoup de têtes d'affiches contactées n'étaient pas disponibles à cette date ou plus en tournée (Dominique A, Miossec, Cats on Trees...), ou alors trop chères pour notre budget (Saez, The Do, Daho...). Quant à Murat, il était passé aux Abattoirs au printemps, donc pas possible de le reprogrammer. Je tiens à préciser tout de même que pour moi: Aline et Isaac Delusion sont deux "têtes d'affiche" tout à fait présentables même si effectivement pas très connues du grand public.
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- Vous disiez être prêt à assumer vos choix... mais il est difficile d'installer un festival dès une première édition. La Mairie s'est-elle engagée sur plusieurs années?
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La mairie (à moins d'un fiasco total) s'est engagée pour plusieurs années, en fait sur la totalité du mandat. Oui! Nous savons qu'il est difficile d'installer un festival dès la première année, encore plus d'être rentable. Nous pensons arriver à une certaine reconnaissance et renommée à partir de la troisième édition, idem pour l'équilibre financier. Lorsque je dis que je suis prêt à assumer mes choix, je veux dire que: étant donné que cette programmation est la mienne, que personne ne me l'a imposée, si le public n'est pas au rendez-vous, soit je serai certainement obligé d'ouvrir la prog à d'autres styles de musique plus commerciales pour les années suivantes, soit je quitterai mes fonctions si la ligne artistique et "l'esprit" du festival doivent trop varier par rapport à mes convictions, soit je serai viré tout simplement n'ayons pas peur des mots.
- On a une répartition égalitaire entre artistes ou groupes chantant en anglais et en français (Autour de Lucie, Robi et Aline le vendredi et Baden Baden et la Féline samedi). Est-ce une donnée qui vous importait (je pense que pour Murat, être "indé français", c'est aussi revendiqué son travail sur cette langue) ?
La répartition quasi égalitaire entre artistes chantant en français et en anglais est voulue car j'aime autant les deux. Je suis très sensible aux textes français, étant très accroc aux mots et à la qualité de la sémantique, mais je dois avouer que la pop chantée en anglais par des français possède un charme un tantinet suranné qui me plaît, de plus la langue de Shakespeare au niveau de la rythmique est idéale pour le rock.
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- Dernière question que je me sens obligé de poser (vous pouvez me répondre "en off", "en in" ou en semi-off!!). Je suis un peu surpris que le festival s'organise semble-t-il sans lien avec les Abattoirs... mais je viens de voir que c'était un équipement CAPI (i-e de l'intercommunalité sur l'agglomération)... alors, pour poser une question: Est-ce qu'une synergie est possible à l'avenir avec cette salle qui devrait représenter le rock dans l'agglo (même si on pourrait rêver d'un dynamisme plus important, façon coopérative de mai : la capi compte 100 000 habitants, Clermont 130 000)?
L'histoire est assez simple. Bien évidemment, au départ nous souhaitions complètement travailler en collaboration avec les Abattoirs. En fait on voulait faire le festival sur trois jours (un aux Abattoirs, deux dans le parc des Lilattes en plein air), nous sommes donc allés présenter le projet à José Molina le directeur des Abattoirs pour savoir ce qu'il en pensait et si cela l'intéressait de travailler avec nous. Et là, après plusieurs heures de discussion, il nous a dit que le projet ne l'intéressait pas, qu'il n'y croyait pas, que le rock indépendant c'était pas son truc et que le budget n'était pas suffisant. Nous avons donc du faire sans lui, donc sans sa salle et sans son équipe.
Un concert au parc en 2014 (photo du courrier liberté). joli coin, non?
- Sur le concept de rock indé, et ses contours flous, vous pourrez écouter cette émission de radio:
https://soundcloud.com/nofunshow/le-rock-inde-une-vue-de-lesprit "Par essence déconnecté d’une industrie qui a sû les amadouer à coups de labels indie, le clan des non alignés mérite-t-il encore son statut spécial ? Animé par Nico Prat avec Adrien Toffolet, Christophe Moracin (Domino), Thomas Rozec (France Info) et Guillaume Benfeghoul (tourneur)"
- Laurent Toquet a sorti deux livres, dont une biographie de Nick Drake. infos ici.
- SITE OFFICIEL DU FESTIVAL: http://www.bellesjournees.fr/
- LA PROGRAMMATION:
Deux articles à ce sujet : COURRIER LIBERTE et chez les amis de SOUL KITCHEN
Une programmation vraiment emballante, dans la pop et la qualité, et pour un pass 2 jours pas cher du tout: 30 euros en prévente!
- Finissons par un "Point Muratien", puisque ça m'amuse de le faire...
Robi a été créditée sur Toboggan, et elle est proche de Frank Loriou... mais un autre musicien présent est présent sur un album de Murat.... Je vous laisse 5 secondes pour réfléchir. C'est le batteur de H Burns : le fils de Denis Clavaizolle... qui interprète des pleurs de bébé dans Cheyenn Autumn !! C'est resté un beau bébé...
H Burns est produit par Frank Annese, patron des différents dérivés de SO FOOT... et muratien.
Aline et Valérie Leulliot ont repris sur scène du Murat (Valérie avec l'équipe de Frère animal).
Du côté de LA FELINE, c'est le texte promo qui évoque l'écriture de Murat : "Elle évoque Brigitte Fontaine ou Jean-Louis Murat pour l'écriture ciselée".
Les Baden Baden ont repris du Dominique A, mais ils sont signés chez NAIVE, maison dirigée depuis quelques semaines par Marie Audigier.
Quant à 49 Swimming Pools, c'est le groupe d'Emmanuel Tellier, journaliste ex-Inrocks et Télérama, où il s'est peu illustré en parlant de Murat certes... mais avec un de ses précédents groupes CHELSEA, il faisait partie de la compil CONTRESENS aux côtés de Murat (inédit "n'attends rien").
Enfin, bien sûr, n'oublions pas de préciser que Murat a été invité 4 fois sur Bourgoin (au théâtre Jean Vilar et aux abbatoirs). C'est tout pour le moment! Alors, à très vite sur Bourgoin-Jallieu!